Les mots surlignés font l'objet d'une note
1Monsieur, je receus hier la lettre qu’il vous ha pleu me rescripre par l’archier de monsieur de Chastellard, et quant auls informacions qu’il vous ha mendées, je pense, Monsieur, si qu’aurés
2trouvé par icelles, que je vous hays aulcunement desguisé le faict, l’injure duquel
3j’ey suivye avesques toute la doulceur quy m’a esté possible, vous jurent Dieu,
4Monsieur, que je ne me suys caserné avecques respect et doulceur, moyen d’ors, en l’endroyct
5de tous en général et particullier, que j’eusse faict avesques mon père s’il fust
6vivent, et d’iscy en hors, ferey encores mieulx si je le puys ou scay faire, suivent
7l’admonicion et commendement qu’il vous plaict m’en fayre par vostre dicte letre.
8J’ay faict tenir sus l’heure mesme celle que escripviés au lieutenent de ceste ville,
9ensemble la patente de sa magesté que l’on fera publier ce jourd’huy. Je vous
10promectz, Monsieur, que je tiens advys d’ung grand nombre de bons lyeus que ceulx
11de la saincte religion de ce pays n’attendent que leur heure et adventaige pour
12remuer mesnaige. Toutesfoys, les principaulx sont de sy bon lyeu et de sy bonne race
13qu’ilz doybvent bien penser à une si lourde et poltrone recheutte. Quant à moy,
14Monsieur, je suys desmasqué de tous costés et vous promectz que je n’y hey
15de compères ne de cousins que ceulx qui demeureront bons et fidelles
16subgectz de sa magesté. Monsieur, je vous supplie ne trouver mauvays si je
17vous foys entendre l’incommodité et grand travayl en coy je suys pour entretenir
18le nombre des soldatz qu’il vous ha pleu m’ordonner pour la garde de ce lyeu.
19J’en hey jà changé, de vintedeux ou vintetroys, pour ny pouvoyr temporiser
20car ilz sont tous, jour et nuyct, de guarde, et sy leur hey retrenché, de troys
21sentinelles contreinctes, une ; oultre, Monsieur, que pour la grande chierté des
22vivres qui s’augmente tous les jours, ilz ne peuvent vivre à six soubs par
23jour ; et fault que vous rezollés, Monsieur, que sus le premier estat qu’il vous
24havet pleu leur fayre, ilz pourront justement se tenir chaussés et amunicionnés
25de pouldre, corde et plomb, et à moings de vintetcinq soldatz, je ne puys guarder
26que la moytié de ce chasteau. Les douze Corses qui i estoyent, Monsieur, n’en
27guardoyent que la moytié qui est près de la tour. Les aydes pour le boys et
28chandelles que messieurs du pays hont données à messieurs de ceste ville leur
29payent plus que ne muncte mon estat, celluy des douze soldatz, et toutes les
30guardes de leur ville. Sy, pour le retrenchement qu’il vous ha pleu fayre de noz estatz,
31ilz vous playsoyent, Monsieur, nous ordonner du boys, huylle, sel et chandelles, en
32donnent à voz villes quelques aydes, d’adventaige feriés grande charité car,
33foy de chrestien et de affectionné serviteur et filz, il i va du patrimoyene
34et bien largement de nostre substance. Le bien que vous nous ferés, Dieu le
35vous recongnoistra, et nous serons tousjours plus obligés à le supplier et prier
36pour vostre prospérité et senté. Vous baysent à mon acostumée très humblement
37la mein et supplient celluy qui despart toutes grâces vous donner,
38Monsieur, en parfaicte senté, contente et longue vie. De Chrest, ce sabmedy matin
3929e de novembre 1572.
40Vostre plus humble et plus obéissent serviteur et comme filz
41Deurre Doncieu